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MONSTRE D'ENTITÉ

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« La déception amoureuse est si universelle, qu’elle te fait toucher à la vulgarité. La fadeur de chacune vague à l’âme et te rapproche de ta tombe, ta force vivante mobilisée une vie entière à oublier ta peine. »

Marcelle Proust

 

TU LA REGARDE SE DÉSHABILLER

SES SEINS POINTÉS VERS LE CIEL

SA CASQUETTE À L'ENVERS

ELLE TREMPE TON JOGGING

TON VISAGE ÉCARLATE

INCAPABLE DE PARLER

TES PUPILLES JOUFFLUES

SA BOUCHE EN PÂTURE

TON AMOURE-PROPRE NIQUÉE

 

Larme Peine les joues vide d’orgasme, l’élastique de sa culotte pétrifié dans sa peau de sommeil, elle use d’effort pour se rappeler à elle-même, l’esprit encombrant, le tri sélectif, le verre, le carton, les emballages pleinent ses pensées pauvres, banales, amoureuses.

Hier à la terrasse du café, elles se parlent franchement la bouche tordue de la douleur à venir et de faire semblant de ne rien ressentir. Elle a eu mal par rapport à cette information. Ne sachant que faire de ça, elle a essayé d’utiliser le filtre qui aplatit les visages et lisse les peaux avec les tâches de rousseur et le regard rajeuni, le cerveau choqué plein d’étoiles de dessin animé. Elle le savait déjà et n’en finissait pas de s’affaler dans la déception sentimentale.

L’humaine s’illusionne pour continuer à vivre sereinement dans ses trajectoires quotidiennes, les courses séparées en plusieurs endroits pour faire attention à la tune et à la qualité, Bio c’est bon, Super U, Liddle.

Elle croise Monstre d’Entité à la sortie de l’épicerie avec des canettes fraîches et la hèle trop fort. Elle veut voir quelqu’une qui la sortira loin d’elle-même, de son intérieur plein de merde et de bordel accumulé.

Larme se sent dégénérée d’envie sexuelle malade après l’annonce de sa petite amie hier, elle aimerait goûter à nouveau à ce qu’elle avait avant toute cette chiasse, recouvrir le mal-être et cette gêne impossible à dépasser.

L’oubli est le seul champ possible des fausses innocentes, des mensonges à elle-même, elles continuent de risquer leur peau parce qu’il n’y a que ça à faire à part se plaindre et la drogue et l’alcool.

Larme Peine essaye de pécho Monstre, elle la dévore des yeux depuis trente minutes, elle envoie des compliments plus gros qu’elle pour la faire rire, l’assouplir sous ses doigts, trouver sa faille avec sa langue d’amoure douce qu’elle a encore à donner. Peine se lève, les yeux rouge sang, sa doudoune qui tombe son épaule, les chaînes en acier épais imitation or jaune autour de son cou fine. Elle soulève Entité à bout de bras légère et ivre. Elle veut lui faire une promesse d’éternité qu’elle sera incapable de tenir, infidèle à elle-même, changeante, snob.

L’histoire dit qu’on est multiple, que nos identités sont nos prisons, qu’on déboutonne nos jeans pour pisser là où on veut, on est fragile et forte et amoureuse à en crever, on a mal facilement. Larme Peine aime Monstre d’Entité, la baise Bâtarde, jamais vulgaire même quand elle lui glisse à l’oreille « j’ai envie de te baiser ». Langue aime Larme, Monstre se masturbe sur l’éternité d’Entité, se penche tranquillement, sa bite épaisse à la main pour la lubrifier dans la bouche de Peine.

Peine aime l’avoir au fond de la gorge, envisager l’avenir de façon brutale au jour le jour, sans capacité de se projeter, l’avenir discontinu découpé en moment plus ou moins intense. La langue des fauchées use de dèche pour créer le choc, ne s’habitue pas à tirer la langue.

Larme prend Monstre dans sa bouche, aime son anxiété et sa préciosité maladive, son envie de tout crâmer. Larme Peine est excessive dans l’émotion, ce qu’elle ressent lui dévore le cœur facilement, elle verse. Sa Langue sensible n’est pas correcte, elle en dit trop, elle Bâtarde dans les sillons communes, cherche un sens au creux des Monstres, construit son Entité.

Elle vient de l’amoure et du don, à genoux dans l’obscène, elle dépose ses larmes et ses mauvais poèmes, ses canettes pleines en plein soleil. Larme se remplie d’attachement et de dépendance à l’odeur d’Entité, ses doigts sales d’elle, son teeshirt qui pue.

La vie nocturne est amputée, les monstres en réclame d’errance rangés dans les appartements creux, la drogue qui dégénère l’ennui. On se mime sans cesse effrayées d’être vivantes, on vomit le matin l’acidité de la veille.

Larme jalouse les visages d’enfants, elle voudrait s’écraser contre un torse à moitié plat, gober les seins qu’elle aime. Elle rêve d’Entité, elle veut la voir se faire prendre par une autre, se faire baiser très fort sous ses yeux, pendant qu’elle déciderait de donner sa bouche à l’une ou à Larme.

Entité solitude quand Larme loin bâtarde sa peine. Elle sombre une odeur rance de viande faisandée, la chair morte des poitrines déchirées.

Sur la route, Monstre roule un joint, les cheveux d’Entité frôlent son visage. ­­­­

 

 

 

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